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Comment JCDecaux a fait de la data un atout majeur pour les villes en France et ailleurs !

Cette semaine, parlons smart cities avec François-Xavier Pierrel, Group CDO de JCDecaux ! Eh oui, JCDecaux, leader en affichage publicitaire depuis 1964, présent dans plus de 80 pays, a aussi son mot à dire sur la transformation numérique des villes.

Pourriez-vous nous expliquer votre mission chez JCDecaux ?

Après un passage chez Renault et Facebook, j’ai rejoint JCDecaux à la fin de l’année 2018 avec pour mission de partir d’une feuille blanche et d’écrire la trajectoire, c’est-à-dire mettre en place la stratégie et le programme, ainsi que la structuration de cette équipe data, pour les 3 prochaines années au moins. 

Tout d’abord, nous sommes partis d’une vision assez traditionnelle lorsqu’on se lance dans la data : l’équipe data n’était constituée que de quatre data scientists à l’époque, la volonté de l’entreprise était de renforcer ce département. Ainsi, la stratégie s’est déployée de la manière suivante :

À mon arrivée, le premier projet mis en place était de monter une gouvernance de la donnée entre les 80 pays où JCDecaux se trouve. Ensuite, il a été question de mettre en place les projets qui ont été amenés par les pays au travers de la gouvernance.

Depuis votre arrivée en 2018, comment la stratégie de l’entreprise a-t-elle évolué ?

La stratégie est toujours sensiblement la même divisée en trois étapes consécutives : la première étape est de remporter un appel d’offre auprès de commanditaires privés ou publics (aéroports, gares, villes…), puis de déployer et exploiter les assets et enfin, en troisième étape arrive la vente de média. Nous avons beaucoup tout d’abord travaillé sur notre secteur d’activité, à savoir le média. Nous avons donc beaucoup travaillé en premier lieu sur les notions de segmentation d’audience et de mesures de performance. Au milieu de la deuxième année, nous avons surtout porté une réflexion sur les notions d’exploitation et de maintenance. Et aujourd’hui, nous développons des projets plus éloignés de notre cœur de métier, mais qui visent à optimiser le fonctionnement global de l’entreprise. C’est dans cette optique que nous avons pu développer des outils de modélisation, de prévision.

Ce qui est intéressant de souligner que le rôle de l’équipe data au sein d’une organisation telle que JCDecaux est de participer à la transformation fondamentale de l’entreprise. Il y a très peu de secteurs d’activité qui n’ont pas été pris de plein fouet par le numérique. Alors que la publicité extérieure a peu évolué ces cinquante dernières années, du jour au lendemain, il y a eu une accélération fulgurante du numérique. Il y a encore quelques années, nous vendions des espaces au mois permettant de coller des affiches. Aujourd’hui, il est possible de digitaliser les réseaux en proposant des contenus plus segmentés, plus interactifs ou animés… Une fois ce tournant pris, alors tout un champ des possibles s’ouvre à nous, comme la programmatique, ou encore l’établissement de prévisions…. Tout ceci nécessite de la data, pour comprendre les audiences et les leviers.

Même s’il a fallu deux ou trois ans pour prendre le virage, aujourd’hui, on peut dire que le plus dur est fait.

Comment est-on passé d’une organisation qui vend des espaces publicitaires à une entreprise qui vend de l’audience ?

La dimension traditionnelle existe toujours car tous nos panneaux ne sont pas encore digitalisés à travers le monde. Mais nous constatons déjà que le retour sur investissement des panneaux numériques est bien supérieur à celui des panneaux papiers. En effet, le numérique nous offre l’accès à une variété de typologie d’annonceurs, il est également possible de segmenter à l’heure et aux audiences ce qui nous permet d’avoir une plus grande flexibilité commerciale et data. 

Habituellement, le rôle du CDO est d’aller convaincre la direction de la pertinence de la stratégie choisie en matière de data. À mon arrivée, la direction avait déjà fait le choix de se transformer, ce qui m’a permis de très rapidement réfléchir à la manière de se lancer avec tout d’abord un cœur opérationnel composé de data scientists et data engineers pour être autonome dans les solutions, dans les technologies et dans la manière dont nous allions opérer. Ce pôle représente toujours la moitié de l’équipe data au sein de JCDecaux. 

Nous sommes ensuite venus compléter ce groupe de data scientists avec une équipe Growth qui est un mix entre le product marketing et de l’accompagnement, et a pour vocation de faire adopter nos solutions par les marchés. Nous avons par la suite ouvert une troisième structure, qui gère nos partenariats data et doit donc trouver la data sur le marché (techniques ou data sets).

Nous avons également créé une quatrième équipe, chargée de la communication. Il s’agit là d’un de nos principaux leviers de transformation. Le challenge est, dans ce cadre, de vulgariser et d’éduquer sur des sujets qui ne sont pas évidents. Enfin, la dernière équipe est chargée de l’animation de nos solutions auprès des grands comptes du groupe autour de ces sujets. Ainsi, en deux ans et demi, l’équipe est passée de deux data scientists à un pôle structuré de quarante-cinq personnes. Cette organisation a vocation à assumer ce que nous sommes, c’est-à-dire des techniciens dotés d’une bonne compréhension du marché et des métiers avec lesquels nous allons collaborer.

Sur quels types de données se basent vos segmentations et ciblages ? Comment travaillent concrètement vos équipes data pour mieux conseiller vos clients ?

Si on considère tout l’écosystème média et publicitaire, nous avons une grande machinerie qui réunit les GAFA, ceux-ci connaissent les utilisateurs en cross-device, la notion d’ultra-personnalisation est prépondérante. Chez JCDecaux, a contrario, nous faisons du média de masse. Nous avons un besoin de données différentes, qui restent précises mais à une maille supérieure. 

Ainsi, nous nous intéressons de près aux éléments de localisation, de centres d’intérêts, et de segmentation d’audience. Plus précisément, les questions que nous nous posons sont les suivantes : 

Dans un deuxième temps, nous avons trois  typologies de données :

Quelles applications concrètes avez-vous pu faire de la data ?

La période Covid nous a encouragé à nous reposer d’autant plus sur la data que JCDecaux est l’un des premiers acteurs des aéroports d’un point de vue publicitaire. En effet, on exploite environ 180 aéroports. Nous avons constaté que, depuis des années, les flux de passagers étaient toujours les mêmes. Du jour au lendemain, nous sommes devenus incapables de prévoir le trafic aérien en raison de l’évolution des décisions politiques ou de celle du virus. Notre mission aujourd’hui est de trouver quels seraient les scénarios de reprise. Il faut trouver des clés de réponse dans un cadre contraint. En nous basant sur les données aéroportuaires, les prévisions annoncées par les compagnies aériennes et autres acteurs de l’industrie, et nous essayons de modéliser des prévisions à cinq ans avec des scénarios complémentaires, grâce à la data. Sans la crise sanitaire, nous ne serions pas encore intéressés par ce problème. 

Par ailleurs, après la première phase de la covid – le premier confinement -, il a fallu anticiper le retour des audiences dans les villes. Pour cela, nous avons agrégé de la donnée en open data et acheté de la donnée (volume de données de caisse chez Monoprix, transaction de transports en commun) pour développer des indices de mobilité, pour une douzaine de pays, nous permettant d’établir précisément quand les populations reviennent et pourquoi. C’est ainsi que nous avons constaté, après ce premier confinement, l’explosion des transports individuels de type vélos en libre-service, tandis que le nombre d’usagers dans les transports en commun a chuté. C’est le cas à Paris notamment. Nous avons pu établir des points de comparaison par pays, et ces constatations ont pu nous permettre de faire des projections de déconfinement par pays.

On connaît l’impact que cela a pour les annonceurs, mais qu’en est-il des villes ? Comment ces panneaux, désormais “intelligents”, transforment-ils ces dernières?

Effectivement, il y a des sujets serviciels et des sujets d’innovation, qui eux, concernent les capteurs wi-fi pour comprendre les flux de population. Il est possible d’en mettre sur des abribus ou dans des panneaux, ce qui nous a permis de mettre en place tout un programme autour de la pollution (détection de particules fines, niveaux d’hygrométrie) dans les villes. Nous faisons actuellement les premiers tests au Japon, nous allons en restituer les premiers  résultats aux villes avec qui nous collaborons, soit en données brutes soit avec de la data visualisation pour expliquer les différents phénomènes. 

JCDecaux est également acteur de la mobilité douce avec un service de vélos en libre-service dans plus de 60 villes. Nous travaillons actuellement sur deux sujets :

La data est un nouveau sujet pour nous, nous travaillons déjà avec certaines villes, mais nous espérons que ces projets vont se développer dans les mois à venir. 

D’après vous, comment pourrons-nous aller encore plus loin en la matière grâce au MLOps, AIOps ?

Chez JCDecaux, nous avons commencé par faire de la haute couture, nous devons maintenant faire du prêt-à-porter ! En d’autres termes, nous avons commencé à mettre en production des cas d’usage de manière artisanale, et nous souhaitons désormais automatiser et industrialiser les projets. En effet, le département data a gagné sa crédibilité au sein du groupe, et les demandes de projets augmentent. Aux prémices du pôle data nous travaillions avec deux pays, aujourd’hui, nous en accompagnons plus de trente. Il est possible de garder un aspect “haute couture” sur des sujets très stratégiques, mais si nous voulons répondre aux demandes du groupe, il est crucial de structurer notre offre. Ainsi, nous souhaitons injecter dans nos process du DevOps, MLOps et AIOps pour venir fluidifier la mise en production de tous ces projets. 

La prochaine étape qui arrivera au deuxième semestre de cette année, c’est de savoir comment on va réussir cette mise à l’échelle. Il est donc essentiel de s’outiller de solutions qui permettront de répondre à ces problématiques. Nous avons également complété notre équipe de trois nouveaux Data Engineers ainsi que de notre premier DevOps, pour monter en puissance.

D’après-vous, dans quelles zones géographiques êtes-vous le plus avancés ?

Notre spécificité est que nous pouvons nous adapter à des environnements très variés. En termes de cas d’usages, certains pays émergents sont plus avancés en termes d’analyse de données et nous sommes déjà en mesure de répondre à des problématiques concrètes dans ces zones géographiques. 

Par exemple, au Nigéria, nous sommes en capacité de calculer les temps de trajet en fonction du trafic sur les routes qui traversent Lagos d’une porte à l’autre. Nous faisons également des mesures d’audience dans les aéroports. Nous avons développé des mesures d’audience pour le plus grand métro du monde à Shanghai (15 millions de passagers par jour). Il est important de souligner que ces pays ont une grande capacité à être adaptables et force de proposition en matière de données.

A propos de l'invité
Francois Xavier Pierrel

François-Xavier Pierrel, Chief Data Officer chez JCDecaux – N°1 mondial de la communication extérieure – pilote la Direction Data afin d’accélérer la transformation du média en développant des solutions plus innovantes et contextualisées au bénéfice de toutes les parties prenantes du Groupe. 

Après être passé par Microsoft, Facebook et Renault avant de rejoindre JCDecaux en novembre 2018, François-Xavier bénéficie d’une solide expertise de la data au service de la transformation des entreprises.